jueves, 26 de marzo de 2015

Prier l’Angélus, c’est contempler Dieu fait homme

« En ce jour-là
S’il n’y eut qu’une chair
Pour recevoir l’aurore,
Partout monta
L’espoir de faire corps
Enfin à la lumière. » (Hymne de l’office des lectures du 25 mars)

Ce qui s’est passé « ce jour-là » dans le petit bourg galiléen de Nazareth entre une jeune fille accordée en mariage, et le mystère infini de Dieu, nous le célébrons aujourd’hui dans la fête et nous reconnaissons que cet événement est la source même de notre vie, de nos espérances et de tous les espoirs du monde. Comme beaucoup de maîtres spirituels et de poètes nous imaginons ce moment où toute la Création retient sa respiration pour entendre le Oui de la jeune femme, le Oui de Dame Marie selon l’expression de saint Bernard : « O Vierge donne vite une réponse. O Notre Dame dis la parole que la terre, que les enfers, que même les cieux attendent. (…) Pourquoi tarder ? Pourquoi craindre ? Crois, rends grâce et accueille » (A la louange de la Mère de Dieu, homélie IV § 8, SC 390 p. 227)

Chaque jour, trois fois par jour, nous revenons sur cet événement dans la prière de l’Angélus, et nous contemplons cette scène rapportée par saint Luc. C’est avec l’attitude chrétienne par excellence, la gratitude, que nous prions devant l’Ange et la Vierge, car ce mystère est le commencement de notre salut.

En s’unissant à la Vierge Marie Dieu rejoint la nature humaine, il entre dans la condition des hommes. Car il s’agit bien d’une union, la plus haute qui se puisse concevoir, de l’intérieur de la personne de la Vierge. Nous restons devant le mystère du comment mais nous comprenons que la puissance du Très Haut s’exerce dans le corps de la Vierge et donne la vie à un nouvel être humain, le Fils de Dieu – Fils de l’homme. « C’est dans la nature intégrale et complète d’un vrai homme que le vrai Dieu est né, tout entier dans ce qui lui appartient, tout entier dans ce qui nous appartient » selon les formules célèbres du Tome à Flavien de St Léon Le Grand.

Dieu devient l’un de nous, il entre dans cette solidarité de tous les hommes entre eux. Comprenons bien que la nature humaine est affectée par cette conception, cette visitation sans retour. Depuis l’Incarnation du Verbe, il est possible de définir la nature humaine comme ce qui a été habité par le Verbe de Dieu. Qu’est-ce qu’un être humain : un être visité et habité par le Fils unique de Dieu, appelé à devenir lui-même fils de Dieu. La parole est célèbre dans le Concile Vatican II : « Par son incarnation le Fils de Dieu s’est en quelque sorte uni à tout homme » (Gaudium et Spes 22).

Saint Bernard nous permet de relier les mystères : l’Incarnation et la Rédemption : « Nous aussi, ô Notre Dame, nous attendons un mot de commisération, nous qu’accable misérablement la sentence de damnation. Et voici que t’est offert le prix de notre salut : nous serons immédiatement délivrés si tu acceptes. Tous nous avons été créés dans la Parole éternelle de Dieu, et voici que nous mourrons : par ta brève parole nous devons être recréés, pour être rappelés à la vie. O Vierge pleine de tendresse, c’est cette réponse que te supplie de donner le pauvre Adam avec sa malheureuse descendance exilée du Paradis » (St Bernard, ibid.)

Cette venue de Dieu est un choix de pure miséricorde, lorsque les temps furent accomplis pour que le Fils éternel naisse de la femme (cf. Ga 4,4). En scellant son destin avec le nôtre, le Fils accepte la mission du Père : « chercher et sauver ce qui est perdu » (Mt 18,12), « rassembler dans l’unité les enfants de Dieu dispersés » (Jn 11,52) selon les expressions de Jésus lui-même. En proclamant le texte de l’Evangile qui annonce le Oui de la Mère nous contemplons le Oui du Fils. Par son incarnation Il part à la quête de tous les hommes pour accomplir « la volonté de Celui qui m’a envoyé : que je ne perde aucun de ceux qu’il m’a donnés » (Jn 6,39), et par le moyen de la Croix Il les ramène à la Maison du Père.

Ainsi se manifeste la Gloire de Dieu, cette vie divine communiquée aux hommes. Cette Gloire resplendit sur le visage du Ressuscité, « et nous tous reflétons comme dans un miroir la gloire du Seigneur, nous sommes transfigurés en cette même image, de gloire en gloire, précisément par l’Esprit du Seigneur (2 Co 3,18). Chaque instant, chaque battement du cœur, chaque respiration, est une occasion de recevoir le don de Dieu, la vie du Christ glorifié. Il se donne à chaque instant à tous les êtres humains dans le fond de leur âme, il se donne par son Eglise au moyen des sacrements. C’est pourquoi nous qui cherchons à devenir un peu plus disciples chaque jour, donnons-nous au Seigneur du plus profond de notre cœur, et donnons-nous à nos frères, comme en quelque des sacrements du Christ.

C’est là que la Mère de Dieu est celle par qui le salut est entré dans le monde, et en accompagnant les frères de son Fils, elle éduque à des attitudes propres aux disciples : accueillir et donner. Ainsi notre vie se laisse traverser par la grâce à la suite de la jeune fille de Nazareth. Là est notre joie, la joie de l’Evangile, que notre cœur brûle de communiquer au monde entier. Amen.





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