A l’occasion des finales départementales et régionale du labour (rassemblement national des jeunes agriculteurs) à Montlet (Haute-Loire), Monseigneur Luc Crepy, évêque du Puy-en-Velay, s’est rendu ce samedi pour célébrer la messe. Homélie.
Depuis l’aube des temps, l’homme pour se nourrir, a travaillé le sol afin d’y faire pousser des plantes diverses et, plus tard, nourrir ses troupeaux. Les labours font, si je puis dire, partie du patrimoine de l’humanité : retourner la terre après la moisson, préparer le sol pour les futures récoltes, tracer ces beaux sillons droits qui façonnent le paysage de nos campagnes. Les labours dessinent les liens forts qui unissent l’homme à la terre. Votre finale des labours, ici à Monlet, n’est pas seulement une affaire de concours – le meilleur laboureur – mais elle traduit aussi votre amour de la terre, votre goût du travail bien fait pour que les champs produisent les récoltes nécessaires à tous.
Dans l’Évangile, Jésus est attentif à cette belle activité humaine qui s’offre à ses yeux dans les champs qu’il traverse et il en a tiré plusieurs paraboles. A travers les labours, les semailles, les moissons, ce qui parle le plus à Jésus semble être la relation étroite entre la vie et la mort. Labourer, semer, récolter est une question de vie et de mort. Ainsi une des paraboles célèbres est-elle celle du grain de blé. Le grain de blé doit mourir pour germer et donner de nouveaux grains en abondance. « Si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il reste seul ; mais s’il meurt, il porte beaucoup de fruit.» (Jn 12,24) Mourir pour vivre, telle est l’histoire du grain de blé. De même, les labours vont enfouir les restes des moissons, les plantes adventices et la terre se trouve nue, sans végétation, comme apparemment morte. Puis viennent les temps des semailles et des premières germinations : la vie apparaît, fruit du travail de l’homme, et l’agriculteur contemple avec bonheur cette vie née de son labeur et annonçant la joie de la récolte.
Mourir pour vivre : curieuse logique que celle des semailles et du grain de blé ! Et pourtant cette logique si ordinaire dans la vie des cultivateurs ne résonne facilement ni à nos oreilles, ni à nos cœurs. Faut-il vraiment mourir pour vivre ? Pour les plantes, pourquoi pas ? Mais pour nous ? Nous savons cependant que pour grandir, pour avancer dans la vie, il nous faut laisser sur le chemin bien des choses qui nous encombrent ; il nous faut faire des choix et choisir c’est toujours mourir à d’autres projets, à d’autres désirs, à d’autres rêves ; il nous faut aussi mourir à certaines parts de nous-mêmes si nous voulons être vrais et cohérents dans notre existence. Mourir pour vivre fait partie de nos propres expériences humaines. Si le grain de blé doit mourir pour porter du fruit, nous aussi, dans notre humanité, nous franchissons des étapes de mort pour renaître à une vie nouvelle.
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