martes, 27 de junio de 2017

Homélie pour la solennité du Cœur de Jésus.


Paramé, vendredi 23 juin 2017

Avec saint Jean Eudes nous écoutons la Parole de Dieu. Le choix que notre Père Jean Eudes a fait parmi les textes de l’Ecriture Sainte a une visée contemplative : les textes nous font entrer dans une contemplation de l’amour de Dieu. C’est bien ainsi qu’il propose de commencer toutes les démarches de prière : adorer, contempler, s’émerveiller.

Mais est-il possible de contempler l’amour ? Oui, lorsque l’amour a un visage, il est possible de le regarder face à face. L’amour n’est pas une idée mais il est relation : à l’écoute de la Parole nous rencontrons Jésus, nous établissons avec lui une relation. Nous entendons l’Evangile selon saint Jean précisément dans ce moment où l’amour est incandescent, lorsque « Jésus passe de ce monde à son Père », nous contemplons l’amour devenu visible dans cette relation entre le Père et le Fils ; c’est aussi le moment où Jésus est avec ses amis et non plus seulement avec ses serviteurs. Voilà où Jean Eudes nous emmène. Il nous conduit à ce qui a été le but de toute sa vie : il nous conduit à la rencontre de Jésus, l’épiphanie de l’amour de Dieu.

Jean Eudes nous emmène au sommet pour célébrer le Cœur du Sauveur. Il nous conduit à l’acte de foi en écoutant la Parole : l’amour de Dieu s’est manifesté en plénitude en cet homme, Jésus, dans cet être humain. Puisque Jésus est « l’image du Dieu invisible », puisque celui qui le voit voit le Père, Dieu n’a pas une autre facette de l’amour qu’il n’aurait pas révélée dans la personne humaine de son Fils. Dieu n’a rien caché, il a tout donné en son Fils.

Cet émerveillement est aussi celui du Pape Pie XII dans l’encyclique Haurietis Aquas : « le Cœur de Jésus-Christ, uni hypostatiquement à la divine Personne du Verbe a, sans aucun doute, palpité d’amour et de tout autre sentiment, et cependant, tous ces sentiments étaient en parfait accord et s’harmonisaient et avec sa volonté d’homme pleine de divine charité, et avec l’amour divin lui-même que le Fils partage en commun avec le Père et avec l’Esprit-Saint, de telle sorte qu’il n’y eut jamais entre ces trois amours, aucun manque d’accord ou d’harmonie. » (n°22) Nous retrouvons la manière sublime avec laquelle Jean Eudes décrit le Cœur du Christ : « Nous avons trois Cœurs à adorer dans notre Sauveur, qui ne sont néanmoins qu'un seul Cœur par l'union étroite qu'ils ont ensemble. « lectionnaire propre 43) En raison de l’incarnation, le Cœur de Dieu nous est dévoilé.

Voilà le contenu de notre témoignage missionnaire : Jésus est cet homme qui a aimé divinement, nous pouvons comprendre la hauteur, la longueur, la hauteur et la profondeur de l’amour parce que cet amour existe et qu’il s’est révélé en Jésus Christ.

Et bien vite nous disons cet homme qui nous a aimés, cet homme qui m’a aimé et qui m’aime infiniment. Car la contemplation se fait participation. Ce mystère devant lequel je m’émerveille, il m’est donné d’en faire l’expérience. Cet amour est pour moi. Nous sommes surpris parfois par la manière de dire de Jean Eudes, à la première personne mais c’est bien l’expérience singulière que chacun peut vivre. Cet amour me rejoint, sa miséricorde m’enveloppe, ce n’est pas un objet que je regarde mais un don que je reçois.

Et c’est aussi le contenu, un deuxième aspect de notre proclamation missionnaire : annoncer à chaque personne qu’elle est aimée sans limite et sans condition. Dans notre condition humaine nous pouvons vivre des choses tellement difficiles, qui nous abiment beaucoup, et pourtant nous savons que jamais cet amour ne nous laissera tomber. Cet amour ne change pas les conditions de notre existence mais il nous donne de les vivre autrement, avec le cœur relié à cet amour. Ce lien intérieur à notre être est comme le proclame saint Paul aux Romains « l’amour de Dieu répandu en nos cœurs par l’Esprit Saint qui nous a été donné ». Il est vital plus que tout de se savoir aimé, accepté, accueilli, sans jugement, alors que celui qui nous aime connaît nos cœurs et tous les recoins plus ou moins obscurs, il connaît les défauts, les trous noirs intérieurs, les révoltes, les mouvements divers de notre ménagerie intérieure… et il nous aime, car cet amour plus fort que la mort est un amour qui communique la vie nouvelle.

Tel est le miracle : l’amour manifesté dans le Cœur de Jésus est l’amour de Dieu, nous le contemplons, nous l’accueillons comme un amour actuel en raison de la Résurrection du Christ. L’accueil de l’amour éternel de Dieu agit en nous est comme les eaux vives qui jaillissent du Temple et qui se déversent dans la mer morte. L’image est d’Ezechiel, celui qui annonce le don d’un cœur nouveau par le don de l’Esprit. En choisissant ce texte en première lecture, Jean Eudes a l’intuition de notre participation à l’amour de Dieu, à l’amour du Cœur de Jésus… Nous avons entendu le commandement nouveau dans l’Evangile : « Aimez vous comme je vous ai aimés ». Cette phrase n’est possible qu’en raison de la participation à l’amour du Cœur du Christ. Et c’est la source de notre joie et de notre dynamisme missionnaire. « Alors votre joie sera parfaite, nul ne pourra vous la ravir ».

Voilà le troisième aspect de notre mission : communiquer l’amour de Dieu, de toutes les manières possibles et imaginables. Notre vocation ultime est là, dans cet amour reçu et partagé. Nous héritons du Cœur selon les paroles de Jean Eudes dans son testament ; c’est un curieux héritage qui se reçoit pour être donné, et plus il est donné plus il est reçu !

Ainsi notre mission de disciples missionnaire à l’école de Jean Eudes, dans la variété des situations et des ministères, est de contempler l’amour de Jésus, de recevoir l’amour de Jésus et de donner l’amour de Jésus. Jésus dans nos yeux, Jésus dans nos cœurs, Jésus dans nos mains aurait dit M. Olier.

Aussi, lorsque nous célébrons des Jubilés nous rendons grâce pour cet amour que nos confrères ont rencontré, qui les a saisis, et dont ils ont été et dont ils sont aujourd’hui les témoins. C’est ce qui fait leur grandeur et provoque notre reconnaissance. Lorsque Vincent s’engage pour être incorporé à notre Congrégation, il s’engage avant tout à aimer de toutes ses forces, de toutes ses facultés, de tout son cœur pour porter au monde cette Bonne Nouvelle. Lorsque le Provincial prend ses fonctions, c’est en vue de faire percevoir le pouvoir de l’amour de Jésus et encourager ses frères à aimer davantage là où il les envoie, à dynamiser ses frères et sœurs associés à faire grandir le Règne de Jésus là où l’amour de Dieu les a placés en ce monde. Cela passe toujours par une écoute bienveillante pour être sûr de demeurer dans l’amour.

Si nous mettons d’autres ingrédients que l’amour dans ce que nous faisons – et c’est le cas bien sûr – nous blessons l’autre. Si nous demeurons dans l’amour, à savoir dans l’écoute, l’attention personnelle, la prise en considération… alors tout ce que nous pouvons impulser ou demander est plus facilement accueilli. Nos ministères servent ce projet de Dieu et rien d’autre. Il arrive de nous servir au passage en prenant par exemple une petite gloire personnelle, sachons le reconnaître et remettons notre faiblesse à Jésus. Si nous entretenons l’illusion de notre puissance, idem remettons à Jésus. Quand nous avons à décider quelque chose, même si c’est difficile, ne le faisons pas sans amour.

Une précision : notre cœur sait bien quand c’est le cas ou non, notre conscience discerne ce qui est juste ou non. Il n’y a pas à jouer avec l’idée que l’amour serait une réalité trop vaste pour en parler. C’est l’essentiel de ce que nous avons à vivre. C’est le plus beau de ce que nous pouvons offrir.

Alors en ce jour où toute l’Eglise contemple l’amour de Dieu manifesté en Jésus, célébrons avec une grande joie et dans la confiance tous ces événements – Jubilés, incorporation, prise de fonction – à l’image de Jésus : tout pour la gloire de son Père. Recevons le Cœur de Jésus et recevons de ce Cœur un nouvel élan pour la mission, sans jamais nous décourager de la situation, sans baisser les bras. Je pense à la Province de France. L’amour de Jésus est la source de son dynamisme missionnaire et le contenu de son annonce du Royaume. Pour nous, c’est la même chose : aimer nous pousse à la mission et nous n’annonçons rien d’autre que ce qui nous anime. Le renouveau de la Congrégation viendra de l’intensité de notre amour et c’est pour cela que nous vivons en communauté. Béni soit le Seigneur pour saint Jean Eudes et la Congrégation que nous formons. Béni soit Dieu pour la mission qu’il nous confie en nous donnant son Cœur pour aimer davantage à la plus grande gloire de Dieu. Amen

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