miércoles, 28 de septiembre de 2016

Homélie de Mgr BOULANGER – Session de rentrée du séminaire à Lisieux


La Mission : Un rayonnement d’Amour

En 1927, le Pape XI a déclaré Sainte Thérèse, patronne principale des missions de tout l’univers à l’égal de Saint François Xavier. Tout en vivant à Lisieux, derrière les grilles de son carmel, elle sent le désir non seulement d’aimer Jésus mais de le faire aimer. « Je sens le besoin, le désir d’accomplir pour toi Jésus, toutes les œuvres les plus héroïques. Je voudrais parcourir la terre ». Comme Charles de Foucauld, Thérèse a une âme de missionnaire. Pensons à son souci de la conversion des pécheurs, à Pranzini, cet assassin qui sera condamné à mort et qui sera pour elle comme son premier enfant que le Seigneur lui confie. Elle écrit à Céline : « Notre mission, comme carmélites, est de former des ouvriers évangéliques qui sauveront des millions d’âmes dont nous serons les mères … »

Sa vocation de missionnaire, elle la définit en ces termes. « Ah ! Malgré ma petitesse, je voudrais éclairer les âmes comme les Prophètes, les Docteurs, j’ai la vocation d’être Apôtre … je voudrais parcourir la terre, prêcher ton Nom et planter sur le sol infidèle la Croix glorieuse, mais, ô mon Bien-aimé, une seule mission ne me suffirait pas, je voudrais en même temps annoncer l’évangile dans les cinq parties du monde et jusque dans les îles les plus reculées … » Le ressort de son élan missionnaire, c’est bien d’aimer avec le cœur de Jésus. Jésus nous a révélé que Dieu a soif d’aimer et d’être aimé. « O Jésus mon amour … ma vocation enfin je l’ai trouvée : ma vocation c’est l’Amour ».

On comprend mieux pourquoi Thérèse dit qu’au cœur de l’église, elle sera l’amour. En relisant 1 Cor. 13, elle comprend que la source de toute vie missionnaire est l’Amour Trinitaire. « La charité me donna la clef de ma vocation… Je compris que l’Amour seul faisait agir les membres de l’Église, que si l’Amour venait à s’éteindre, les Apôtres n’annonceraient plus l’évangile, les Martyrs refuseraient de verser leur sang… Je compris que l’Amour renfermait toutes les vocations, que l’Amour était tout, qu’il embrassait tous les temps et tous les lieux … en un mot qu’il est éternel. »

Thérèse a prié pour les séminaristes en particulier pour le futur abbé Bellière, pour les prêtres et pour les missionnaires, mais n’oublions pas non plus que les incroyants ont eu une place privilégiée dans sa prière et son offrande. Dès l’âge de 14 ans, elle avait découvert que Dieu aime comme un Père qui embrasse jusqu’au fond de l’être ; et Il aime en premier. Il le fait parce qu’Il souhaite que les hommes eux-mêmes participent à son être, à sa vie. Alors, elle veut faire connaître l’Amour de son Fils à tous et d’abord aux plus désespérés de l’humanité et aux plus criminels, aux plus éloignés de Dieu et aux plus emprisonnés par des scrupules religieux.

Elle est solidaire de ceux qui ne peuvent croire. Elle a été marquée par la nuit de la foi qu’elle a vécue alors qu’elle avait un cœur extraordinairement ouvert à Dieu. Sa grande souffrance est de savoir combien Dieu est Amour et elle s’aperçoit à quel point tant d’hommes le méconnaissent et passent à côté de la vérité et du bonheur.

Madeleine Delbrêl avait perçu le sens de la mission pour Thérèse et elle écrira : « Peut-être Thérèse de Lisieux, patronne de toutes les missions, fut-elle désignée pour vivre au début de ce XX° siècle un destin où le temps était réduit au minimum, les actes ramenés au minuscule, l’héroïsme indiscernable aux yeux qui le regardaient, la mission ramenée à quelques mètres carrés, afin de nous enseigner que certaines efficacités échappent aux mesures d’horloge, que la visibilité des actes ne les recouvre pas toujours, qu’aux missions en étendue allaient se joindre des missions en épaisseur au fond des masses humaines.»

Le Pape Jean-Paul Il, dans sa très belle Encyclique sur la “Mission du Christ Rédempteur”, rappellera que le véritable missionnaire, c’est le saint. Au fond il s’agit d’aimer l’Église et les hommes comme Jésus les a aimés. Trop souvent dans l’Église, nous nous affrontons sur les méthodes pastorales et nous croyons que ce sont nos méthodes et nos programmes qui convertissent les cœurs. On peut
évangéliser en jean ou en col romain. Ce dont l’Église a besoin aujourd’hui, c’est de véritables saints. Il ne suffit pas de renouveler les méthodes pastorales dira Jean-Paul II ni de mieux organiser et de mieux coordonner les forces de l’Église. « Il faut susciter un “nouvel élan de sainteté”. Le missionnaire est un contemplatif en action.. .Le missionnaire est un homme de la charité pour pouvoir annoncer à chacun de ses frères qu’il est aimé de Dieu et qu’il peut lui-même aimer, il doit faire preuve de charité envers tous, dépensant sa vie pour son prochain”.

Oui, la mission est un rayonnement d’amour. Le missionnaire est quelqu’un qui a fait l’expérience de l’amour du Seigneur dans sa vie. On ne peut être témoin de Jésus sans être devenu son disciple. D’où le Pape François parle de disciple-missionnaire. On ne peut évangéliser sans adorer, sans contempler. Mais en même temps, on n’évangélise que ceux qu’on aime, ceux pour qui on est prêt à donner sa vie. “Tu aimeras” nous rappelle Jésus dans l’Évangile. On ne croit qu’à des témoins qui sont capables d’aller jusqu’à donner leur vie, à aimer jusqu’au bout. Le missionnaire, ce n’est pas un représentant commercial de l’Évangile au profit d’une succursale du Vatican. Un missionnaire, c’est quelqu’un qui a donné sa vie pour le Christ et ses frères. La mission c’est un rayonnement d’Amour. Voilà ce que Thérèse voudrait nous dire.

+ Jean-Claude BOULANGER
Évêque de Bayeux – Lisieux



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